Photos Terry Guillaume / Pascal Rapin Bien que le Pouillot à grands sourcils atteigne chaque automne par centaines les côtes et les îles de la mer du Nord et de l’Atlantique à l’occasion d’une migration inversée, les données restent extrêmement rares dans notre pays, presque toutes d’oiseaux capturés. Mais cet automne, un afflux encore jamais vu impliquant des milliers d'individus a touché les côtes de la mer du Nord et la Norvège. Il semble bien que cette véritable invasion va toucher la Suisse, avec déjà deux données hâtives ce 30 septembre à Birsfelden près de Bâle et une capture aux étangs de Chaux à Payerne. Ouvrons l'oeil...et surtout les oreilles ! Le Pouillot à grands sourcils niche du bassin du fleuve Petchora (Russie) à travers la Sibérie jusqu’aux côtes de la mer d’Okhotsk, au sud jusqu’aux monts Saian et Sichote-Alin (Russie). Il est remplacé en Asie centrale par le Pouillot de Hume, auparavant considéré comme conspécifique. La seule population européenne, dans la république russe des Komis, avoisine 45'000-46'000 couples. Les quartiers d’hiver se situent en Asie du Sud-Est entre le nord-est de l’Inde, le sud de la Chine et la Malaisie. Les données suisses et du lac de Constance se répartissent entre le 13 septembre et le 9 novembre, dont 8 dans les deux premières décades d’octobre. Les observations sur les côtes européennes ont lieu surtout entre début septembre et mi-novembre, avec un pic début octobre. En Allemagne, les oiseaux sont observés en moyenne une semaine plus tard à l’intérieur du continent (date médiane mi-octobre) que sur les côtes. En Europe, le passage se déroule très rapidement, comme l’indique la brièveté des escales : un oiseau bagué le 21 octobre 1988 sur l’île de Portland (Angleterre) a été contrôlé le lendemain sur l’île anglo-normande de Guernsey (113 km au sud), et un autre bagué le 21 septembre 1990 à Enga (Norvège) a été contrôlé 5 jours plus tard sur l’île de Fair Isle (Ecosse) (786 km au sud-ouest). Les observations hivernales et les cas d’hivernage sont extrêmement rares en Europe, tout comme les données entre fin mars et mi-mai. La première donnée suisse ne date que de 1961, ce qui coïncide avec la première mention française pour le XXe siècle, du 21 octobre 1960 en Camargue. En France, 13 données ont suivi jusqu’en 1980, avant que le nombre d’observations n’explose à 236 entre 1981 et 1990 et 385 entre 1991 et 2000. En 1981-2000, la moyenne annuelle était de 31 entre 1980 et 1998 (maximum 94 en 1988), dont 82 % à Ouessant (Finistère). En Allemagne, 207 Pouillots à grands sourcils ont été homologués entre 1977 et 1999; on y a recensé en moyenne 16 par année en 1980-89, puis 21 en 1990-99. Environ 70 % des données allemandes proviennent de l’île d’Helgoland, où déjà en 1846-87 on y recensait 86 individus. En contraste, il n’existe que 3 données en Autriche jusqu’en 2002 et environ 30 en Italie jusqu’en 2002. Dans le centre et l’ouest de l’Europe (Grande-Bretagne surtout), des afflux marqués se sont produits en 1967, 1975, 1981, 1982, 1984, 1985, 1986, 1988, 1992, 1994, 1996 et 1997 notamment. Le Pouillot à grands sourcils niche dans la taïga sibérienne. En automne, il fait escale dans les buissons et les bois de feuillus en plaine, souvent à proximité de l’eau. Diurne et territorial en période de reproduction, il se nourrit principalement de petits insectes et d’araignées prélevés dans les buissons et jusque dans la couronne des arbres. Très vif, il se déplace rapidement d’une branche à l’autre en agitant les ailes ; il descend parfois dans les broussailles jusqu’à terre. L’espèce se repère à son cri, bien distinct de ceux du Pouillot véloce : c’est un « tsuiist » aigu de Mésange noire, bien différent du « touit » montant ou « tiu » descendant du Pouillot véloce. |
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