Photo: Josiane Rannou Des Ibis chauves issus du projet de réintroduction autrichien (www.waldrappteam.at) séjournent en Suisse pour la deuxième fois. Il s’agit d’un adulte (« Domino ») et d’une jeune (« Shorty »). Tous deux se trouvaient près de Coire GR il y a 1 mois puis vers Samedan GR. Par la suite, les deux oiseaux se sont séparés et « Shorty » est apparu près de Fribourg et à Versvey VD (Source : Avinews du 25.9.2012 et ornitho.ch). Le 21 octobre 2012, le jeune Ibis chauve « Shorty » a été photographié en Bas-Valais à Collombey. Il est recherché pour changer sa balise qui émet des signaux faiblissants. L’Ibis chauve est un des oiseaux les plus rares du monde, ne survivant en nombre restreint qu’en quelques falaises bordant l’Atlantique sur la côte marocaine et sur les rives de l’Euphrate en Turquie. L’espèce a pourtant été récemment découverte au Yémen, en Arabie saoudite et en Syrie, ce qui alimente l’espoir que des populations inconnues subsistent. La population marocaine est partiellement sédentaire alors que celle d’Asie mineure est migratrice, hivernant principalement en Ethiopie. L’espèce nichait au XVIe siècle en Suisse et en Autriche. Il a disparu au XVIIe siècle de ses derniers refuges alpins, reliques d’une distribution primitive mal connue. Sa présence ancienne dans le Jura soleurois a été confirmée par la découverte, lors d’une fouille dans la station mésolithique de Balm unter der Fluh près de Günsberg SO, des restes de 3 individus, en particulier des morceaux de bec typiques. D’autres sites étaient occupés à Bad Pfäffers dans le nord-est de la Suisse, près du lac Majeur et en Autriche dans le Tyrol (Salzburg et probablement Innsbruck), en Styrie (Graz), dans les Appenins (Italie) et en Slovénie. Les jeunes étaient très appréciés pour la table et même tenus pour une friandise, raison pour laquelle on les dénichait en descendant les falaises en rappel. Cette population était vraisemblablement migratrice, comme l’était celle de Turquie son extinction à l’état sauvage en 1989. A Birecik (Turquie), l’un des derniers sites de nidification de la population orientale, on comptait 3'000 couples en 1890, 530 en 1953, 65 en 1964, 23 en 1973 et un seul individu survivant en 1989 ; au Maroc, dernier bastion de la population occidentale, on recensait 1'000 couples en 1930, 198 en 13 colonies en 1975 et plus que 78 couples en 6 colonies en 1990. Diurne et colonial, l’Ibis chauve habite les falaises bordant la mer ou un cours d’eau. En Suisse, son régime alimentaire était composé de vers, de courtilières, de larves de hannetons, de coléoptères, de sauterelles, de grillons, de petits poissons et de grenouilles. Il picore ses proies à la surface du sol sec ou dans les herbes, les extirpes de fissures ou de sous des pierres, ou en enfonçant son bec dans la terre lorsqu’elle est suffisamment meuble. Très bruyant lorsqu’il est en groupe, l’Ibis chauve pousse sans cesse un « chroup » grogné à connotation sociale. D’après Gessner (1555), l’Ibis chauve nichait dans les falaises, les vieilles tours et les murs élevés de châteaux en ruine. Il pondait 2-3 oeufs et quittait les sites de nidification apparemment au début de juin. Les causes principales du déclin de l’espèce sont la conversion de son habitat à l’agriculture par les drainages, l’utilisation intensive de pesticides et les dérangements humains. Plusieurs sites de nidification ont disparu noyés sous des barrages hydroélectriques en Turquie et au Maroc, et les derniers sites de reproduction marocains sont actuellement menacés par un projet touristique. Des projets de réintroduction sont actuellement en cours en Autriche et en Italie. Un individu épuisé a été capturé en mars 1481 sur les rives du lac de Constance à Überlingen, où l’espèce nichait probablement à l’époque. |
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