La sous-espèce nominale du Pouillot véloce niche en Europe tempérée des Pyrénées et de la Grande-Bretagne à la Pologne, la Hongrie et la côte occidentale de la mer Noire, remplacée par P. c. abietinus en Scandinavie et en Russie à l'est jusqu'à l'Oural, dans le Caucase et le nord de l'Iran, P. c. tristis en Sibérie du bassin du fleuve Petchora à la Kolyma, P. c. brehmii dans la péninsule Ibérique, le sud-ouest de la France et le Maghreb, P. c. exul à Lanzarote et Fuerteventura (Canaries orientales), P. c. canariensis aux Canaries occidentales. Les individus présentant des caractères intermédiaires entre P. c. collybita et P. c. tristis, provenant des zones de contact en Russie, ont été décrits par certains auteurs comme P. c. fulvescens. Avec plus de 3'000'000 de couples, l'Allemagne est le pays d'Europe (Russie non comprise) le plus peuplé. Les quartiers d'hiver se situent dans la ceinture sahélienne de la Sierra Leone au Soudan et à l'Ouganda. La sous-espèce nominale hiverne principalement sur le pourtour méditerranéen et en Europe occidentale à l'ouest et au sud de l'Allemagne et de l'Autriche ; les oiseaux nordiques et orientaux appartenant à P. c. abietinus, au comportement migratoire plus marqué, se mêlent aux précédents (où la proportion des deux sous-espèces n'est pas quantifiable) et atteignant leurs principaux quartiers d'hiver dans la ceinture sahélienne, certains individus atteignant le Congo ; la sous-espèce sibérienne P. c. tristis hiverne principalement du Moyen-Orient à l'Inde. Le Pouillot véloce est un nicheur abondant et répandu dans toute la Suisse, principalement aux étages collinéen à montagnard, plus clairsemé dans la zone subalpine. On le trouve jusque vers 1'600 m dans l'ouest du pays et plus de 2'000 m localement en Valais et dans les Grisons, exceptionnellement aussi dans les Alpes vaudoises comme à Javerne le 18 juillet 1962. Les nidifications les plus élevées ont été constatées à 2'060 m dans le val Poschiavo GR et à 2'100 m dans le val Bever GR, mais des chanteurs ont été entendus encore plus haut, p. ex. à 2'180 m au Lagh Viola dans le val Poschiavo et à 2'200 m au-dessus de Zermatt VS. Les migrateurs (P. c. collybita et P. c. abietinus) peuvent être observés dans tout le pays, les observations et captures étant régulières aux cols de Bretolet VS et de Jaman VD. Les familles se dispersent hors des sites de nidification dès mi-juillet, en prélude à la migration postnuptiale qui débute mi-août, culmine à fin septembre et dans la première moitié d'octobre, puis diminue régulièrement jusqu'en novembre. A cette période, les Pouillots véloces européens semblent avoir cessé de migrer, comme en témoignent les reprises d'un individu bagué le 20 octobre 1988 à Seyssel (Ain F), contrôlé à Lutry VD le 25 novembre suivant à Lutry VD, 90 km au nord-est, ou encore d'un oiseau bagué le 9 octobre 1994 à la Corbière FR, repris le 29 novembre suivant à Yverdon VD, 20 km au sud-ouest. En décembre, l'espèce est encore régulière en plaine au bord des lacs et des cours d'eau, où l'on peut voir des regroupements comptant jusqu'à dix individus, au max. 50 du 28 novembre au 7 décembre 1994 à Yverdon VD, se nourrissant presque exclusivement de pucerons amassés sous des rameaux. Les effectifs diminuent pourtant pendant le mois de décembre pour atteindre le point le plus bas à fin janvier. Les hivernants paient probablement un lourd tribut lors des coups de froid, pouvant même être totalement éradiqués lors d'hivers rigoureux. Au printemps, les avant-coureurs arrivent dès la dernière décade de février en plaine, l'arrivée générale des migrateurs ayant lieu entre mi-mars et mi-avril et se terminant début mai. Les nicheurs s'installent au courant du mois d'avril, comme en témoigne le déplacement atypique d'un adulte bagué le 7 avril 1966 en Bade du Sud D, retrouvé le 24 mai suivant à Zoug, 72 km au sud-ouest. Elle se prolonge jusqu'à fin avril, en montagne notamment, surtout lorsque les conditions météorologiques défavorables bloquent la migration. Au cours du XXe siècle, la date d'arrivée des premiers migrateurs s'est avancée d'env. deux semaines en Suisse, conséquence probable du réchauffement climatique, ce qui se traduit par une ponte plus précoce ; la migration d'automne s'est retardée dans une moindre mesure. Hormis l'observation d'un chanteur le 19 avril 1992 aux Grangettes VD, les observations de Pouillots véloces sibériens sont comprises entre le 15 octobre et le 6 février. Aucun changement significatif ne se dessine à long terme, l'aire de reproduction étant demeurée inchangée entre 1972-76 et 1993-96. Une hausse a toutefois été constatée depuis le début des années nonante en de nombreux endroits, probablement à la faveur d'hivers plus doux ; une chute brutale, de courte durée, a été observée suite au mois de février polaire de 1999. Les modestes effectifs hivernants varient fortement en fonction de la température et régresse de façon plus ou moins marquée, en particulier lors des vagues de froid. Le nombre d'hivernants est en augmentation depuis la fin des années huitante. Peu sélectif quant à son habitat, le Pouillot véloce se cantonne dans les boisements les plus divers, pour autant qu'il s'y trouve quelques buissons et que leur frondaison ne soit pas hermétique. En montagne, il préfère les versants frais, plus riches en feuillus, et accompagne volontiers les aulnes. Diurne et solitaire, il se nourrit principalement de pucerons Homoptera, de chenilles Lepidoptera, d'autres insectes (diptères Diptera, hyménoptères Hymenoptera, coléoptères Coleoptera, orthoptères Orthoptera) et d'araignées Arachnoidea, complétant parfois son régime alimentaire avec des baies en fin d'été. En été, le Véloce se tient de préférence dans le haut des arbres, voletant d'une branche à l'autre, piquant les insectes sous les feuilles et les rameaux. En migration, il affectionne particulièrement les roselières, friches et arbustes riches en insectes, notamment les bouleaux et les saules ; on l'observe alors plus près du sol, effectuant des virevoltes en l'air ponctuées de claquements de bec, à l'assaut de quelque moucheron, qu'il picore aussi à la surface de l'eau. En hiver, on le trouve presque exclusivement au bord des lacs de plaine, surtout au bord du lac de Neuchâtel et dans le bassin lémanique, dans les zones abritées de la bise riches en buissons et offrant des caches nocturnes telles que le lierre. Les migrateurs voyagent principalement de nuit, mais aussi par petites étapes diurnes, solitairement ou en groupes lâches, des concentrations comptant jusqu'à plusieurs dizaines d'individus se produisant en certains endroits (dans les haies bordant le Rhône en Valais notamment) au point culminant de la migration lors de conditions météorologiques perturbées. Le Pouillot véloce émet régulièrement un doux « tû-i » interrogateur qui signale sa présence, parfois aussi « tiu » descendant, toujours bisllabique (P. c. collybita et abietinus). Le chant du mâle, émis depuis la partie sommitale d'un arbre, est une strophe rythmée avec la régularité d'un métronome « tsip-tsap-tsip-tsap-tsip-tsap-tsip » séparés de « tr-tr » à peine audibles. Le cri du Pouillot véloce sibérien P. c. tristis est un « hû » monosyllabique plaintif bien différent de celui des sous-espèces européennes ; son chant irrégulier et plus varié que celui du Véloce européen évoque plutôt un Fitis. L'activité vocale reprend en septembre/octobre, après une pause estivale. Le nid d'herbes et de feuilles sèches, en forme de dôme avec une entrée latérale, est à moitié enfoui dans les débris végétaux dans une dépression du sol, aussi sur une souche, dans un buisson bas ou un jeune épicéa, généralement à moins de 40 cm du sol, exceptionnellement jusqu'à 2.5 m de hauteur ; un nid a été découvert dans un marais, sur une touffe de laîche entourée d'eau. La construction dure env. une semaine, dès la dernière décade de mars. Les adultes retrouvent leur nid grâce à des repères visuels. Les 5-6 (4-7) œufs sont pondus une première fois dès mi-avril en plaine, généralement pas avant le mois de mai au-dessus de 700 m d'altitude, au plus tôt dès le 8 avril 1961 à Yverdon VD. Une seconde ponte a généralement lieu en juin/juillet ; les premières couvées sont généralement de 6-7 œufs alors que les secondes n'en comptent que 4-5 en moyenne. Les derniers jeunes quittent le nid mi-août, mais un nid contenant des œufs en incubation a été découvert le 5 août 1959 à Wettingen AG et une famille a été observée le 7 septembre. L'incubation par la femelle dure 13-15 jours et les jeunes quittent le nid au bout de 12-15 jours ; ils sont encore nourris par le couple pendant env. 1 semaine après l'envol. L'espèce est parfois l'hôte du Coucou gris. Les nids sont vulnérables aux prédateurs et aux rongeurs. La maturité sexuelle est atteinte à l'âge d'un an. La densité des nicheurs varie fortement selon le type de milieu : la plus forte, de 23 couples/10 ha, a été trouvée dans les forêts de la rive sud du lac de Neuchâtel ; 9 couples/10 ha ont été recensés dans une forêt riveraine claire à Maschwanden ZH et dans une forêt mixte au Dählhölzli près de Berne ; dans de jeunes stades forestiers, on a trouvé 5.3 couples/10 ha à Cossonay VD, 7 territoires/9.2 ha à Lausanne VD et 9 territoires/11.4 ha à Soleure. Une forêt humide à Kehrsatz BE hébergeait 6 territoires/10 ha ; dans les chênaies à charme, la moyenne oscille entre 4 et 7 coulpes/10 ha, dans les hêtraies et châtaigneraies de 2 à 4 couples/10 ha, par exception 6 couples/10 ha ; une sapinière des Préalpes n'hébergeait que 2 couples/10 ha et une hêtraie à résineux à 700-800 m en Suisse centrale seulement 5 territoires/55 ha. Au Pays-d'Enhaut VD, où l'espèce est largement distribué jusque vers 1'600 m d'altitude, les densités moyennes les plus élevées dépassent à peine 10 couples/100 ha. Dans les Alpes françaises, les densités sont de 1.4 territoire/10 ha dans les hêtraies à épicéas de l'étage montagnard, de 0.9/10 ha dans les pessières subalpines et au plus de 0.7/10 ha dans le mélézein. Dans la région des Grangettes VD, 80-85 couples ont été recensés sur 6 km2 au gré des biotopes favorables de 1979 à 1988, principalement concentrés dans la ripisylve. L'espèce ne paraît actuellement pas menacée. Liste des observations du Pouillot véloce sibérien Phylloscopus c. tristis au XXe siècle : La sous-espèce sibérienne P. c. tristis n'a été identifiée qu'à six reprises en Suisse: 1957 : 22 décembre, 1 ind. de type sibérien entre Buchillon et Saint-Prex VD (Vuilleumier 1958) - 1985: 18 octobre, Marin NE, 1 a.c., capturé, photo (M. Kohler) - 1992: 19 avril, Les Grangettes VD, chantant, capturé, photo (P. Undeland, J. Lehmann, Y Ottesen) (Mosimann et al. 1993, Schmid et al. 1993) - 1992: 15 octobre, col de Bretolet VS, 1 a.c., capturé, photo (P. Mosimann) (Mosimann et al. 1993) - 1994: 28 novembre -3 décembre, 2 ind. (dont un capturé le 29 novembre) et 4-7 décembre 1 ind. Yverdon VD, photo, enregistrement (L. Maumary, S. Monnerat, L. Vallotton, T. Guillaume) (Leuzinger, Mosimann, et al. 1996) - 1996 : 25 janvier-6 février 1996, 1 ind. de type sibérien au marais de la Versoix/Chavannes-de-Bogis VD et Divonne F (Y. Schmidt, L. Maumary, C. Chautems, H. Duperrex, Z. Fleury, M. Baudraz) (Maumary & Baudraz 2000) - 2000 : 3-5 décembre, 1 ind. capturé à Chavornay VD (L. Maumary, Z. Fleury, Y. Frutig, J. Duplain) (Preiswerk et al. 2001) ; 14-17 décembre, 1 ind. Chavornay (L. Maumary, Z. Fleury, J. Duplain, I. Henry, E. Bernardi) (Maumary 2002) - 2001 : 20/21 décembre, 1 ind. de type sibérien à la retenue de Niederried BE (L. Maumary, L. Vallotton) (Maumary 2002) |
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