Chevalier gambette bagué rouge C19. Préverenges VD, en compagnie de 2 Bécasseaux variables adultes. 16 août 2015. L. Maumary. Les reprises d'oiseaux bagués entre le 6 août et le 16 septembre en Suisse indiquent les différentes voies de migration et quartiers d'hiver des oiseaux traversant notre pays. Certains migrateurs longent la Méditerranée, comme en témoignent 3 reprises en Camargue (Bouches-du-Rhône, France) dont 2 vers mi-octobre et 1 à fin mars, alors que d'autres rejoignent rapidement la façade atlantique française, à l'instar d'un jeune bagué le 20 août 1967 à Witzwil BE et tiré 14 jours plus tard à Cassy-Lanton (Gironde), 677 km à l'ouest ainsi que d'un individu bagué le 8 août 1974 à Klingnau AG et tiré 3 jours plus tard en Charente-Maritime, 728 km à l'ouest, ce dernier ayant parcouru en moyenne 243 km par jour ! Les oiseaux peuvent hiverner sur les côtes méditerranéennes, comme en témoigne les reprises de deux oiseaux tirés en décembre et janvier en Espagne (Tarragona et Valencia) alors que d'autres traversent le Sahara pour aller hiverner jusque golfe de Guinée : un adulte bagué le 25 août 1974 au lac de Bret VD a été contrôlé le 17 avril suivant au Ghana, 4'565 km au sud. Cette reprise concernait probablement un oiseau appartenant à la population boréale, dont les migrations sont plus longues et plus tardives au printemps que celles des populations occidentales ; en effet, 7 reprises d'oiseaux scandinaves ont été effectuées entre la Mauritanie et le Ghana. Les reprises sont dues dans 6 cas à la chasse et dans 3 cas à des contrôles par des ornithologues. L'aire de nidification du Chevalier gambette s'étend des côtes atlantiques européennes à travers la zone tempérée d'Eurasie à l'est jusque sur la côte pacifique russe et au sud jusque dans le Xinjiang chinois. La sous-espèce nominale niche de la Grande-Bretagne et du Portugal à la Sibérie occidentale, remplacée par T. t. robusta en Islande et aux îles Féroé et par 4 autres sous-espèces à l'est de l'Oural. La sous-espèce nominale hiverne principalement sur les côtes africaines et en Méditerranée, les côtes d'Europe occidentale accueillant en hiver la population islandaise T. t. robusta, qui se joint à la partie sédentaire des nicheurs locaux ; les sous-espèces orientales hivernent de la Méditerranée orientale aux côtes de l'océan Indien, en Indonésie et aux Philippines. Avec environ 80'000 couples, la Biélorussie héberge près d'un quart de la population européenne. En Suisse, le Chevalier gambette nichait jusque vers 1930 dans quelques marais du Plateau, la dernière preuve de reproduction ayant été apportée en 1919 au Kaltbrunnerried SG, où l'espèce se reproduisait régulièrement jusqu'alors. Sur les rives limitrophes du lac de Constance, sa reproduction a été certifiée pour la dernière fois en 1928 au Wollmatinger Ried D, où l'espèce a probablement encore niché jusqu'en 1934. Le Gambette nichait encore probablement jusqu'à la fin des années vingt au Fanel NE/BE, au Hallwilersee, au Auslikoner Ried, au Greifensee ZH et au marais de Neerach ZH, jusqu'en 1916 dans les marais entre Ohringen et Hettlingen et auparavant au Wauwilermoos LU, sur les rives du lac de Constance au delta du Rhin A et au bord du Léman à l'embouchure de la Dranse F. L'espèce fait escale dans les zones humides du Plateau et du Tessin, notamment au bord des grands lacs, occasionnellement dans le Jura. Les sites d'escale les plus fréquentés sont le Chablais de Cudrefin VD/Fanel NE/BE, Yverdon VD, Préverenges VD, les Grangettes VD, la retenue de Klingnau AG, le marais de Neerach ZH, les Bolle di Magadino TI, le bassin d'Ermatingen TG, la baie de Steinach SG et le delta du Rhin A. Les observations sont rares à l'intérieur des Alpes, où l'espèce est surtout observée au bord des lacs de Haute-Engadine, situés vers 1'800 m d'altitude, ainsi qu'en Valais central dans la plaine du Rhône. Dès le mois de juillet apparaissent des adultes en migration postnuptiale, le passage culminant en août avec l'arrivée des jeunes, diminuant en septembre et se terminant à mi-octobre. Quelques attardés sont encore exceptionnellement observés de novembre à février, mais seuls deux hivernages complets sont connus, probablement du même individu, en 1967/68 et 1968/69 au lac de Constance. Les avant-coureurs du printemps arrivent parfois à fin février mais surtout en mars, le passage culminant une première fois dans la première décade d'avril avec les nicheurs d'Europe tempérée, puis deux pics secondaires se dessinent à fin avril et vers mi-mai, correspondant au passage des oiseaux plus nordiques ayant hiverné en Afrique. Des immatures s'attardent régulièrement en juin. La migration prénuptiale est représentée par env. 80 % des observations, mais la fréquence saisonnière dépend de la situation géographique : à Préverenges VD, 90 % des observations sont printanières alors qu'à Yverdon VD le printemps ne fournit que 58 % des données. Le nombre de migrateurs observés en Suisse la nettement diminué entre les années huitante et les années nonante, au printemps comme en automne : la fréquence de l'espèce de 1990 à 1999 atteignait à peine le tiers de celle enregistrée de 1985 à 1999. Les populations d'Europe continentale et méridionale ont régressé après 1950, diminution qui a été constatée dans une moindre mesure dans les quartiers d'hiver d'Europe occidentale. Le Chevalier gambette niche dans une grande variété de milieux humides, côtiers ou à l'intérieur des terres, des salines méditerranéennes à la toundra norvégienne. En migration à l'intérieur du continent, il fréquente principalement les vasières, bancs de sable, îles de gravier, grèves exondées sur les rivages des lacs et grands cours d'eau, plus rarement que les autres chevaliers les étangs, mares, marais, prés et champs inondés. Diurne et nocturne, il se nourrit d'invertébrés aquatiques, parfois de petits poissons et larves d'amphibiens, picorés à vue tout en longeant le bord de l'eau, en sondant la vase du bec ou en eau peu profonde, s'avançant parfois dans l'eau jusqu'au ventre mais rarement en nageant. Les groupes s'associent parfois pour pêcher de petits poissons, immergeant parfois entièrement la tête et le cou sous l'eau. Les escales se prolongent souvent pendant quelques jours, voire une semaine, les migrateurs défendant parfois un territoire de gagnage, surtout au printemps. En Suisse, on l'observe le plus souvent isolé ou par petits groupes comptant jusqu'à 20 individus, rarement plus lors de blocage météorologique. Très loquaces, les migrateurs émettent des appels flûtés et prolongés « diouu » et des « tiu-lu-lu ». Des vols nuptiaux accompagnés de chants sont parfois observés, comme le 2 mai 1981 à la Vallée de Joux au lac Ter, à 1'010 m d'altitude. Au Kaltbrunnerried, le Chevalier gambette nichait dans la végétation herbacée haute, souvent sur un îlot entouré d'eau ou un touradon. Les premiers nids étaient construits environ un mois après le retour des oiseaux qui se situait entre le 13 et le 24 mars, en moyenne sur 10 ans le 18 mars. La ponte avait lieu dans le dernier tiers du mois d'avril, au plus tôt le 21 avril 1913. Sur 13 pontes, 12 contenaient 4 œufs et la dernière 3 œufs. La durée d'incubation était de 22 à 23 jours dès la ponte du dernier œuf, l'éclosion la plus tardive ayant été constatées le 2 juin 1917. Les jeunes s'essayaient au vol à l'âge de 4 semaines et étaient indépendants à 6-7 semaines. Sur les rives du lac de Constance, les nids étaient souvent noyés par la montée des eaux. Jusqu'en 1916, 4-6 couples nichaient au Kaltbrunnerried SG et de 1917 à 1919 encore 2-3 couples. Au Wollmatinger Ried D, on comptait 4 couples nicheurs en 1924 et 1 de 1927 à 1929. Il n'y avait qu'une ponte annuelle. En Suisse, la disparition du Gambette comme nicheur est imputable au drainage des marais pour l'intensification de l'agriculture. L'espèce est en déclin dans plusieurs pays d'Europe, notamment dans les noyaux de population sur les côtes de la mer du Nord. Les sites d'escales sont devenus rares en Europe centrale, où la revitalisation des zones humides et la création d'îlots favorisent le bon déroulement de la migration. |
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