Harelde boréale mâle adulte. Les Grangettes VD et Ouchy-Lausanne, décembre 2019. Lionel Maumary. L'Harelde a une distribution circumpolaire. Elle niche au Groenland, en Islande, au Svalbard, en Scandinavie et au bord de l'océan arctique en Sibérie, en Alaska et au Canada. Une population isolée niche sur les côtes de la Baltique, dans le golfe de Finlande et dans celui de Botnie. Avec 7'500-14'000 couples, la population scandinave est très petite comparativement à celle du nord-ouest de la Sibérie, qui compte plus de 4'500'000 d'individus. L'espèce hiverne sur les côtes du nord et de l'ouest de l'Europe, ainsi que sur la côte atlantique de l'Amérique du Nord et de part et d'autre du Pacifique. Les côtes de la Baltique accueillent 90% de la population européenne en quelques énormes concentrations pendant l'hiver, le reste se distribuant sur les côtes de la mer du Nord, du nord de la France et des île Britanniques ainsi que sur celles d'Islande. Seul un très petit nombre hiverne à l'intérieur du continent européen. La Suisse est située très au sud de l'aire d'hivernage habituelle de l'Harelde, raison pour laquelle elle n'y est que rare en hiver sur les grands lacs du Plateau. La plupart des observations proviennent du Léman (surtout le Petit-Lac) et du lac de Constance (surtout dans le bassin d'Ermatingen TG/D et dans la baie d'Hegne D ainsi qu'au delta du Rhin A et à la baie de Bregenz. L'espèce est exceptionnelle à l'intérieur des Alpes (lacs de Haute-Engadine GR vers 1'800 m, avec 6 données aux lacs Poschiavo GR et de Davos GR) ainsi qu'au Tessin. En l'absence de reprise d'oiseau bagué, la provenance des oiseaux observés en Suisse est énigmatique. En automne, les premiers oiseaux n'apparaissent que rarement dès mi-octobre, en règle générale dès mi-novembre avec les premières vagues de froid. Les effectifs augmentent en fonction de la rigueur de l'hiver pendant le mois de décembre pour se stabiliser jusqu'à mi-mars. Les oiseaux quittent alors leurs quartiers d'hiver, certains y restant jusqu'à fin mai, époque à laquelle des migrateurs peuvent être observés hors des sites traditionnels, comme par exemple cet oiseau vu le 17 mai 1986 sur le lac de Poschiavo GR 960 m (H. Schmid). Seuls quelques rares cas d'estivage sont connus: un mâle blessé a passé tout l'été 1958 à l'embouchure de la Venoge VD (M. Jean-Petit-Matile) ; un jeune mâle du 12 décembre 1984 au 1er septembre 1985 sur l'Aar près de Leuzigen BE (W. Christen, F. Kurz) ; un individu le 15 juillet 1953 aux Grangettes VD (E. Altherr) ; un mâle les 8 juillet et 15 septembre 1986 à Lindau D (E. Seitz) ; un mâle jusqu'au 12 juillet 1995 au bassin d'Ermatingen TG/D (H. Jacoby) ainsi qu'une femelle les 9 et 23 juillet 2003 à Märkt D (M. Leuzinger). Le nombre moyen d'oiseaux atteignant la Suisse en hiver ne semble guère avoir changé depuis le milieu du XXe siècle, mais l'apparition de la Moule zébrée Dreissena polymorpha a sans doute favorisé l'installation des hivernants. Des afflux se produisent certains hivers, comme en 1980/81, 1988/89, 1990/91 et 1993/94, mais aucune tradition ne s'instaure car ces oiseaux ne reviennent apparemment jamais les hivers suivants. L'afflux de l'automne 1988 coïncide avec celui de l'Eider à duvet, de la Macreuse brune et de la Macreuse noire. Principalement diurne, l'Harelde recherche les fonds aquatiques bien garnis en Moules zébrées Dreissena polymorpha, crustacés et larves d'insectes, qu'elle pêche généralement à des profondeurs de 3-10 m, mais elle s'éloigne volontierstrès au large car elle peut atteindre des profondeurs de 30, exceptionnellement 55 m. Elle peut rester immergée pendant 1 à 2 min (généralement 30 à 60 s) et réapparaît à des dizaines de mètres de son point de départ. L'Harelde se fixe souvent pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois au même endroit. On la rencontre généralement isolée ou par petits groupes comptant 2-5 (94% des données, 1950-2003), rarement plus de 15 individus. Si les oiseaux isolés peuvent devenir très confiants lorsqu'ils se sentent en sécurité, les groupes gardent leurs distances vis-à-vis de l'Homme. L'espèce est généralement silencieuse pendant l'hiver, mais elle devient plus bavarde au printemps: la parade nuptiale, qui s'observe parfois chez nous entre février et début mai, s'accompagne de sons harmoniques modulés «ah-ou-a», exhalés aussi bien en vol que posé sur l'eau. Sur les terrains de nidification, ces vocalises nasillardes et plaintives qui portent relativement loin sont à l'origine de plusieurs surnoms donnés par les Inuits, dont l'ancien nom américain «Old Squaw» (vieille femme). L'espèce est vulnérable à la pollution des eaux de la Baltique (par le pétrole notamment), qui est considérée comme responsable de la régression de la population scandinave. De nombreux oiseaux se noient dans les filets de pêche.
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