Chronique ornithologique

Lionel Maumary Points de vue et actualité ornithologique par le biologiste Lionel Maumary.

Un Fuligule à tête noire sur le haut-lac Léman

Lionel Maumary, Oiseaux.ch, 29.12.2015

Le 13 décembre 2015, Mathieu Bally et Marc Bastardot repèrent un probable Fuligule à tête noire au large du Gros Brasset, mais l'oiseau est trop loin pour éliminer un hybride. L'identification est confirmée dès le 23 décembre, lorsque l'oiseau est retrouvé puis régulièrement observé entre Villeneuve et Montreux. Ce fuligule nord-américain est très rare en Suisse et en Europe, où sa première apparition date de 1987 en Grande-Bretagne. Un mâle a hiverné entre Vevey et les Grangettes VD de 1992/93 à 1999/2000 (8 ans, avec des observations en mai à Clarens VD), puis un autre de 2000/01 à 2012/13 (13 ans) sur le Rhin au « Dreiländereck » à Bâle, à la frontière entre la France, l'Allemagne et la Suisse. Un mâle a également été vu le 15 février 2004 à Gletterens FR, ainsi qu'un autre en mai 2015 sur l'étang de St-Disdille (Haute-Savoie).

Fuligule à tête noire mâle en compagnie de Fuligules morillons. Territet VD, 20 décembre 2015. L. Maumary.

Les hivernants de Vevey et de Bâle ont été placés en catégorie D, qui regroupe les observations d'oiseaux dont l'origine est douteuse. En effet, cette espèce originaire du sud du Canada et du nord des Etats-Unis, du centre de l'Alaska aux grands lacs, est fréquente en captivité. Un mâle adulte avait par exemple été observé en compagnie d'une femelle de Fuligule milouinan en octobre 1989 à Bienne BE, non bagué et capable de voler mais aux environs immédiats d'un zoo possédant des canards exotiques. Comme la donnée de 1992/93 était la première pour l'Europe centrale et qu'il n'existait alors que 3 données pour la Grande-Bretagne, il a été jugé plus prudent de considérer cette donnée comme pouvant concerner à un échappé de captivité. De nombreuses observations ont eu lieu en Europe depuis, dont une partie se rapportent manifestement à des oiseaux sauvages. Le fait que l'oiseau du haut-lac Léman ne soit pas bagué et qu'il soit relativement farouche (ne vient pas au pain) et très mobile, indique qu'il s'agit plutôt d'un oiseau sauvage.